Biologie végétale

Écologie végétale

Structure et dynamique

1. Systèmes population-environnement

Les fondements modernes de la dynamique des populations datent de T. R. Malthus (1798), qui établit le concept de la croissance exponentielle et de son impossibilité à long terme, qui sous-tend encore toute la dynamique actuelle des populations, animales comme végétales. Ces fondements ont conduit C. Darwin à envisager les phénomènes de sélection naturelle (« survie du plus apte »). Au cours du XIXe siècle se développe, sur la lancée de Malthus, une dynamique des populations quantitative et théorique, avec notamment le modèle logistique de P. F. Verhulst en 1838. La prise en compte des paramètres de fécondité, de mortalité et de migration date du début du XXe siècle (A. J. Lotka)

Les populations, considérées comme des unités biologiques fondamentales, sont caractérisées par une série de variables telles que l’effectif (ou la densité), la structure spatiale (modalités de distribution des individus dans le milieu), la structure démographique (âge et sexe), la structure génétique (fréquences alléliques) et l’organisation sociale (pour les espèces animales sociales). Cependant, les populations naturelles ne sont jamais des entités isolées : elles s’insèrent dans un environnement avec lequel elles sont en étroite relation et dont elles dépendent.

La dynamique des processus démographiques résulte, d’une part des propriétés des individus qui composent la population et, d’autre part, des propriétés de l’environnement. Il faut par exemple ne pas oublier l’existence des rétroactions exercées par l’ensemble de la population sur les propriétés de chaque individu comme sur celles de l’environnement.

Le système est donc capable d’autorégulation et d’évolution. Ainsi, lorsque les conditions climatiques sont particulièrement favorables, la mortalité diminue, la natalité augmente et la densité de la population s’accroît. Cet accroissement de densité peut affecter négativement le fonctionnement physiologique, le comportement ou les capacités démographiques (fécondité, probabilité de survie) des individus qui composent la population. Il y a donc régulation de la densité par le jeu de mécanismes « densité-dépendants ».​

2. La croissance exponentielle et la régulation dépendante de la densité

Le modèle démographique le plus simple considère une population théorique N dans laquelle entre deux dates, t et t + 1, chaque individu donne en moyenne naissance à F individus et meurt avec une probabilité M. L’environnement est donc considéré comme constant. Entre t et t + 1, il entre donc en moyenne dans la population FN(t) individus et il en meurt en moyenne MN(t). Le bilan des entrées et des sorties N(t + 1) = N(t) + F N(t) – MN(t) conduit donc à : N(t + 1) = (1 + F – M) N(t) = AN(t). Si les naissances l’emportent sur les décès (F > M), la population augmente.

La même formule s’applique au pas de temps suivant, mais à partir de N(t + 1), et l’excédent précédant de croissance est donc capitalisé: la croissance est exponentielle, avec un taux de multiplication A = 1 + F – M, selon N(t) = N(0) At.

Des résultats similaires s’obtiennent en passant à une échelle de temps continue : on écrit alors le nombre de naissances dans l’intervalle de temps infinitésimal entre t et t + dt, FN(t) sous la forme f dt N(t) où f est un taux instantané de fécondité. De même on écrit MN(t) = m dt N(t) où m est un taux instantané de mortalité.

On obtient alors l’équation dN/dt = (f – m) N.

Cependant, ces modèles ne sont pas directement applicables à des populations animales ou végétales in natura, car ils considèrent que tous les individus ont les mêmes performances. Ce n’est évidemment pas le cas et il faut considérer les classes d’âge.

On représentera donc la population par les effectifs des différentes classes d’âge, regroupés dans un vecteur N(t). L’hypothèse de paramètres constants conduit à la même équation N(t + 1) = M N(t), où M est une matrice, construite à partir des paramètres démographiques.

Donc des paramètres démographiques constants engendrent une croissance (ou décroissance) exponentielle des effectifs. La principale utilité des modèles démographiques, plus encore que de permettre des projections de populations, est de permettre de hiérarchiser l’effet des variations des différents paramètres démographiques sur le régime de croissance des populations. L’étape suivante est, bien sûr, la prise en compte de l’inévitable diminution des performances démographiques avec l’augmentation de l’effectif de la population étudiée.

3. Fluctuations, limitation et régulation des populations

Les effectifs des populations fluctuent dans l’espace et dans le temps. Dans beaucoup de cas, ces fluctuations sont faibles par rapport aux capacités de multiplication des espèces. Les effectifs des populations sont ajustés à la capacité limite du milieu grâce à des processus de régulation. La proposition est qu’une population ne peut être en équilibre avec son milieu que si sa croissance dépend de sa densité, ce que traduit en termes mathématiques simples l’équation dite logistique de Verhulst, ou régulation densité-dépendante.

Dans le modèle dN/dt = rN, on considère que le taux de croissance r décroît avec l’effectif N. On écrit donc : dN/dt = r(N) N.

Le modèle logistique s’appuie sur la plus simple fonction décroissante de l’effectif qui puisse être, r(N) = rmax – bN. L’effectif croît de façon sigmoïde et tend vers une asymptote

K = rmax/b,

la capacité limite du milieu (ou capacité de charge).

Le principal mécanisme de réglage de la densité serait la compétition, le facteur limitant étant généralement la quantité de nourriture disponible, ou chez certains organismes, également une régulation éco-éthologique des effectifs comme l’émigration. Par exemple, les émigrations massives du criquet Chortoicetes terminifera, induites par l’accroissement de la densité, surviennent avant l’épuisement des ressources, ce qui augmente évidemment les chances de survie de tous les individus, qu’ils partent ou qu’ils restent.

Cependant, il existe des populations instables (à comportement chaotique), soumises aux aléas de leur environnement physique et climatique (cas des « suicides » de lemmings). Par exemple, l’abondance des chenilles de Dendrolimus pini a varié de l’ordre de 200 000 fois sur 60 générations suivies dans des forêts de pins en Allemagne (Strong et al. 1984).