Biologie végétale
Écologie végétale
Contenu du module
Interactions positives
Accueil » Écologie végétale » Communautés » Interactions positives
1. Commensalisme
A. Épiphytes
De nombreuses espèces recherchent un support pour se développer. Il s’agit de pérennes herbacées (la moitié en sont des Orchidacées ; mais aussi des fougères, des Broméliacées,…) ou des Cryptogames (Bryophytes, algues et lichens). Les épiphytes se rencontrent dans de nombreuses familles (84) végétales et regroupent 23000 espèces. Certains sont autotrophes obligatoires ou facultatifs alors que d’autres, hétérotrophes, deviennent des parasites (relations – +). Certains ont développé des structures anatomiques particulières pour capter l’eau de pluie (base des feuilles, des racines) ou l’eau atmosphérique (lichens).
Plantes nourrices
Ces plantes protègent d’autres espèces. Par exemple, les cactus (Cereus gigantea) croissent toujours près d’un objet (inanimé éventuellement) car l’ombre diminue la température et la sécheresse du sol, les herbivores les découvrent moins vite et ils sont mieux protégés du gel. Ces mêmes cactus ensuite peuvent servir à leur tour de plantes nourrices car ils offriront ombre, abri et conditions de germination et de croissance à de nombreuses herbacées.
2. Photocoopération
Cette interaction favorise les deux partenaires (souvent des ligneux) mais n’est aucunement obligatoire (sorte de « mutualisme facultatif »).
Les unions de racines entre espèces identiques ou différentes se rangent dans cette catégorie. Ce phénomène est assez commun puisque 160 espèces d’arbres y recourent et 20 % de ces échanges sont interspécifiques. Des échanges d’assimilats et d’hormones ont été mis en évidence et l’« individu » arbre n’est plus guère distinct.
3. Mutualismes
Une relation mutualiste apporte des avantages aux deux partenaires (++). Nous développerons ici deux cas particuliers. D’une part, le mutualisme lors de la pollinisation : la plante retire un bénéfice de la visite de l’agent pollinisateur car le transfert et le dépôt de pollen et donc sa pollinisation, pouvant conduire à la formation de graines et de fruits. L’animal bénéficie de nourriture, soit du nectar (principalement des sucres), soit du pollen (source principale des lipides, protéines et acides aminés).
D’autre part, lors de la dispersion des graines ou fruits, la plante bénéficie du transport et dépôt des graines, l’animal bénéficie de la nourriture (surtout sucres ou lipides) offerte.
A. Pollinisation et pollinisateurs
De nombreux modes de pollinisation existent, mettant en jeu des mécanismes souvent remarquables étant donné la très grande variété des adaptations sélectionnées au cours de l’évolution (co-évolutions fleurs-pollinisateurs ; voir film D. Attenborough). Avant d’aborder les différents modes de pollinisation, abordons le côté « plante ».
A.1 Types de pollinisation
A.1.1 Vecteurs biotiques, pollinisation zoophile
Elle met en jeu la recherche de nourriture par les pollinisateurs et la présence de repères floraux pour localiser ceux-ci. De très nombreux dispositifs adaptatifs en assurent l’efficacité tant au niveau des ressources (pollen et nectar) que des signaux (couleur, marques d’affichage, forme, odeurs, phénologie). Par exemple, au niveau forme, des corolles profondes et à tube étroit ne seront disponibles que pour des animaux spécialisés, dont la longueur des pièces buccales correspond à la profondeur de la corolle.
A.1.1.1 Pollinisation par les insectes ou l’entomophilie
Dans les contrées tempérées, les pollinisateurs principaux sont surtout des Hyménoptères (surtout de la super-famille des Apoïdes, abeilles solitaires et domestiques, bourdons (et guêpes)) et des Syrphes (famille de Diptères). Les bourdons et les abeilles solitaires sont particulièrement efficaces et pour certaines espèces végétales, sont les seuls pollinisateurs car ils sont capables de faire vibrer leurs muscles thoraciques, entraînant la vibration des étamines, ce qui permet de libérer le pollen pour des étamines poricides (ne s’ouvrant que par un pore étroit au sommet). C’est la pollinisation par sonication ou « buzzing », comme pour la tomate (Solanum lycopersicum) ou la myrtille (Vaccinium myrtillus).
Les ressources sont constituées par le nectar et par le pollen. Le pollen constitue la source principale de protéines, d’acides aminés et de stérols (lipides) ; le nectar est la source principale de sucres. Le pollen présente une exine (couche externe) souvent richement ornée et la présence de molécules adhésives à sa surface (manteau pollinique), contribuent à son accrochage aux poils, antennes et autres parties du corps des insectes ; son transport est ainsi grandement facilité. Il est produit en quantité plus restreinte que par anémophilie et parfois en paquets agglomérés (les pollinies chez les Orchidées par exemple). Les insectes étant incapables de synthétiser de novo leurs stérols (précurseurs d’hormones de croissance, de mue, de reproduction), le pollen constitue la source essentielle pour les insectes floricoles. De même, le pollen est la source principale en protéines, polypeptides et acides aminés. Ce pollen prélevé comme alimentation est bien entendu perdu pour la pollinisation (mis en pelotes chez les insectes sociaux pour nourrir les larves de la colonie).
Les nectars sont des liquides sucrés, exsudés par des glandes florales ou extraflorales, les nectaires, qui concourent à l’attraction des pollinisateurs et, par là, à l’efficacité de la pollinisation. Les nectaires floraux sont directement associés à la visite des pollinisateurs ; le rôle des nectaires extrafloraux est plus souvent lié à la défense de la plante (fourmis). La concentration totale en sucres ainsi que leurs proportions relatives diffèrent d’une espèce à l’autre mais également suivant les conditions environnementales, particulièrement les températures et l’humidité relative, la position et l’âge de la fleur. Les principaux sucres des nectars sont le saccharose, le glucose et le fructose.
Les signaux floraux ou repères sont organisés de manière à faciliter la reconnaissance à distance et de guider au voisinage des sources de nourriture.
L’appareil d’affichage et les couleurs des fleurs sont perçus par les pollinisateurs différemment de la perception humaine. Les Apidés (« abeilles sociales »), par exemple, sont sensibles à un spectre de longueurs d’onde compris entre 300 et 650 nm, incluant certains UV mais excluant les rouges. Ainsi, de véritables guides visibles par les insectes apparaissent sous l’action des UV sur des pigments, comme les caroténoïdes ou les flavonoïdes, présents dans les vacuoles des cellules des pièces florales. Les fleurs entomophiles seront donc souvent de couleurs vives, très variables mais avec relativement peu de fleurs rouges. Les couleurs blanches ou jaunes attirent par exemple particulièrement les Diptères, les roses et violettes particulièrement les Hyménoptères.
Le mimétisme existe chez de nombreuses espèces et peut renforcer les signaux floraux. Outre la convergence morphologique de la fleur avec d’autres fleurs productrices de nectar, des femelles d’insectes, ou l’émission de molécules odorantes ressemblant aux phéromones (hormones sexuelles par exemple) peuvent attirer le pollinisateur et déclencher un comportement de pseudo-copulation permettant la pollinisation (Orchidées : Ophrys sp., Drakaea glyptodon, l’ « orchidée dragon »).
D’autres parfums floraux sont généralement libérés de manière diffuse ; dans certains cas, ils sont cependant émis par des organes précis : les glandes à parfums, ou osmophores, d’origine épidermique et liées au phloème.
La nature chimique des parfums émis est très variable. Beaucoup appartiennent aux composés terpéniques et sont produits dans les plastes avant d’être accumulés dans les vacuoles. La teneur en parfum est très variable suivant les espèces (0,075 % du poids frais chez certaines roses, 0,04 % chez le jasmin).
Certaines espèces attirant des Diptères émettent des molécules s’apparentant à l’ammoniac ou à des amines (le ‘dead horse arum’, Helicodiceros muscivorus,; l’arum titan, Amorphophallus titanum).
La production de chaleur (+ 2 °C) en rapport avec la pollinisation, est un phénomène rencontré chez certaines familles, dont les Aracées. Elle provoque la libération d’odeurs putrides (amines) attirant les Diptères pollinisateurs. Une molécule, l’acide salicylique, est responsable de cette élévation de température.
Certaines fleurs (surtout chez les Orchidées mais aussi les lysimaques) produisent des huiles nécessaires et récoltées par leurs pollinisateurs spécialisés (qui les accumulent dans des pattes transformées).
Finalement, la phénologie et le moment d’anthèse sont souvent liées au type d’insectes pollinisateurs. Ainsi, les fleurs pollinisées par les papillons de nuit s’ouvrent au crépuscule (le chèvre-feuille, Lonicera periclymenum).
A.1.1.2 La pollinisation par d’autres animaux
Dans les régions tropicales ou sub-tropicales, des oiseaux pollinisent de nombreuses espèces (Lobelia spp.). Deux grands types d’évolution différentes existent suivant les continents : les Trochilidés (colibris) en Amériques, utilisent le vol rapide sur place au contraire des Meliphagidae (méliphages) d’Afrique ou d’Asie qui se posent sur les plantes. Ces oiseaux étant totalement ou grandement dépendants des ressources en nectar, il faut donc une succession de fleurs productrices durant toute l’année. C’est la raison pour laquelle ce type de pollinisation n’existe pas dans les contrées tempérées ou froides ! De nombreux cas de co-évolution existent et ces oiseaux nectarivores présentent même un système digestif totalement différent des espèces se nourrissant par d’autres voies.
Des mammifères, notamment les chauve-souris (par exemple pour les baobabs, Adansonia, ou les arbres de Durian, Durio zibethinus) peuvent être des pollinisateurs très efficaces. Dans ce cas, les fleurs s’épanouissent la nuit, sont de couleur claire, ont une morphologie pendante et produisent un pollen et un nectar abondants.
Les lémurs noirs pollinisent le palmier des voyageurs (Ravanula madagascariensis) à Madagascar. Tout comme les chauves-souris, un grand avantage pour les espèces pollinisées tient aux grandes distances que sont capables de franchir ces espèces entre deux « arrêts alimentaires », permettant ainsi au moins en partie des pollinisations croisées.
Certains Protea de Nouvelle-Zélande sont même pollinisés par des geckos, alors que d’autres espèces du même genre reçoivent les services de petits marsupiaux.
Les deux types suivants de pollinisation ne concernent pas de mutualismes puisqu’il s’agit de pollinisation par un agent abiotique.
A.1.1.3 La pollinisation par les vecteurs abiotiques
La pollinisation par le vent ou anémophilie
Elle semble a priori dispendieuse en pollen et irrationnelle. Elle correspond cependant à une réussite de l’évolution puisqu’elle est très répandue chez les Gymnospermes et les Angiospermes, surtout dans les régions tempérées et froides du globe (Poacées, arbres printaniers tempérés tels que le noisetier, Coryllus avellana). On admet aujourd’hui que l’anémophilie des Angiospermes n’est pas primitive, elle correspond plutôt à une acquisition secondaire liée à l’absence d’animaux pollinisateurs dans certaines zones climatiques. La première conséquence du caractère hasardeux de l’anémophilie est le risque d’autofécondation. Celle-ci est évitée, au moins chez les Gymnospermes et beaucoup d’Angiospermes, par la séparation spatiale des sexes par dioécie (voir chapitre reproduction).
L’efficacité de la pollinisation par le vent est liée à plusieurs paramètres : 1) le transport, qui met en jeu la légèreté des pollens anémogames, et 2) leur collecte, par l’adaptation des surfaces stigmatiques tels que des stigmates plumeux, de grande surface et munis de nombreux trichomes (poils) chez les Poacées par exemple. Les pollens sont donc nombreux, légers (ballonnets chez les Conifères) ou de petite taille, et pulvérulents (sans système d’accrochage). Des études en soufflerie ont démontré, que l’architecture des cônes de Gymnospermes aussi bien que celle des inflorescences des Angiospermes anémophiles est particulièrement bien adaptée au largage et à la capture des grains de pollen.
A.1.1.4 La pollinisation par l’eau
Elle est limitée à quelques Angiospermes vivant partiellement immergées en eau douce ou saumâtre (zostères Zostera spp. ou posidonies Posidonia spp.). Chez ces espèces, la dioécie est fréquente et les fleurs sont toujours dépourvues, de périanthe, autorisant un accès plus facile du pollen aux fleurs femelles réduites seulement à un pistil terminé par de grandes surfaces stigmatiques. Toutes ces espèces présentent des pollens filamenteux, pouvant atteindre plusieurs millimètres de long, légers et mouillables car dépourvus d’exine.
B. Dispersion et disperseurs
Les principes énoncés pour la pollinisation sont facilement transposables à la dispersion des graines (veuillez établir des liens grâce aux deux épisodes de Private Life of Plants de D. Attenborough, BBC).
De même que les pollinisateurs établissent une relation mutualiste avec les plantes qu’ils pollinisent et dont ils se nourrissent, les disperseurs de graines font de même avec les plantes qu’ils dispersent et dont ils se nourrissent des fruits. Les prédateurs de graines (tout comme les voleurs de ressources florales), digèrent les graines et donc n’assurent aucune dispersion.
4. Symbioses
Il s’agit ici d’interactions positives et obligatoires. Les exemples concernent la symbiose lichénique (algue + mycète) ; les mycorrhizes (champignons + angiospermes), la fixation d’azote atmosphérique (bactéries + angiospermes) ou la myrmécophilie (fourmis + angiospermes).
A. Mycorrhizes
Les mycorrhizes (endo- ou ecto-) permettent au mycète de recevoir des assimilats venant de la photosynthèse et acides aminés par excrétion racinaire ; en échange les mycètes fournissent à la plante des minéraux tels que le phosphore, le calcium ou le potassium. La croissance des plantes est stimulée de 25 à 300 fois ! La relation n’est pas univoque et une espèce d’arbre peut rencontrer 100 espèces de mycètes différentes par exemple. Les ectomycorrhizes (Basidiomycètes) se rencontrent en plus grand nombre dans les zones tempérées de l’Hémisphère Nord que les endomycorrhizes (Phycomycètes, Ascomycètes et Basidiomycètes). Le phénomène est évolutivement très ancien et seules les plantes aquatiques, les Brassicacées, les Cypéracées et les Juncacées sont dépourvues de mycorrhizes.
B. Fixation d’azote
Des procaryotes fixateurs d’azote atmosphérique (Rhizobium) permettent à certaines familles végétales, dont en particulier les Fabacées, de s’installer sur des sols très pauvres.
Une autre théorie est basée de manière similaire sur les traits d’histoire de vie. Des végétaux à longue durée de vie, de taille importante sont fort visibles pour les herbivores. Cette théorie de « l’apparence » prédit que ces plantes pérennes faciles à détecter ont besoin de taux importants de défenses constitutives car elles sont constamment attaquées. Cette théorie permettrait d’expliquer pourquoi de très nombreux arbres présentent de fortes concentrations en tannins, résines et lignine dans leurs feuilles, ainsi que des attributs physiques rendant l’herbivorie difficile (épines, feuilles coriaces). Les défenses sont coûteuses et ont des conséquences sur les taux de croissance à long terme. Les plantes annuelles peuvent être plus difficiles à détecter par les herbivores du fait de leur distribution aléatoire dans le temps et dans l’espace ainsi que par leur taille modeste. Elles investissent donc plutôt dans des défenses inductibles peu coûteuses.
Ainsi, les plantes présenteront des défenses induites plutôt que constitutives si ces défenses induites:
- leur confèrent une résistance envers plusieurs ennemis,
- augmentent la variabilité de la qualité de la nourriture et donc réduisent la performance des herbivores,
- augmentent les mouvements des herbivores et donc la prédation et le parasitisme chez ceux-ci,
- réduisent l’auto-toxicité et
- sont moins toxiques aux ennemis des herbivores que des défenses constitutives.
Aucune solution générale n’est cependant avancée au vu de la grande diversité des défenses et des situations rencontrées.